2009 - Les formes d’argumentation autour de la notion de réversibilité dans la gestion des déchets radioactifs
RAPPORT 2009 - Pierrick Cézanne-Bert, Francis Chateauraynaud
GSPR EHESS (Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales / Groupe de Sociologie Pragmatique et Réflexive)
4RésuméLa loi n° 91-1381 du 30 décembre 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs, dite « loi Bataille », a introduit la notion de réversibilité dans le processus de décision concernant la gestion des déchets radioactifs. Introduite alors comme une possibilité parmi d’autres, le développement des débats sur les déchets radioactifs et la prise en charge du dossier par les autorités politiques ont depuis imposer la notion comme une exigence incontournable pour tous les acteurs du domaine. Ainsi, la décision interministérielle du 2décembre1998, qui retient officiellement la commune de Bure comme site d’implantation pour un laboratoire, érige la réversibilité en principe. Plus tard, la loi programme du 28 juin 2006 prévoit la poursuite des études et recherches relatives au stockage réversible en couche géologique profonde, et surtout énonce que la demande d’autorisation de création du centre de stockage, qui doit être instruite en 2015, ne pourra être délivrée qu’après la promulgation d’une loi fixant les conditions de réversibilité. Le rapport qui suit étudie les formes d’argumentation autour de la notion de réversibilité dans le dossier de la gestion des déchets nucléaires ; il s’appuie pour cela sur un corpus de 2360 textes et l’analyse de 17 entretiens avec les principaux acteurs du dossier. Les énoncés font le plus souvent référence à deux acceptions de la notion : la récupérabilité, comprise comme le maintien d’une accessibilité aux colis de déchets ; la réversibilité du processus décisionnel, permettant de laisser aux générations à venir une liberté de choix quant au mode de gestion. Cependant, cettedifférenciation, bien que présente, n’est pas toujours aussi nette dans notre corpus, la récupérabilité étant perçue comme le mode technique opératoire pour maintenir ouvert l’espace des options possibles, soit une réversibilité effective de la décision.Plusieurs arguments sont mobilisés dans les énoncés, soit comme des motivations possibles pour la réversibilité, soit comme des obstacles à sa mise en œuvre : le principe de précaution ; les générations futures ; les progrès scientifiques et technologiques ; la mémoire du site ; la confiance dans la société opposée à la confiance dans la géologie ; le principe de sûreté du stockage ; la durée de la réversibilité. (...)
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