La porte de la Maison de la résistance s’ouvre. À l’intérieur, ce samedi matin, on se presse vers la grande salle de conférences où l’atelier « Du tréfonds de mon cœur » s’apprête à commencer. Les interprètes se mettent en place afin d’assurer une traduction simultanée en anglais et en allemand : le public est, en effet, de divers horizons durant cette semaine des Rencontres printanières antinucléaires organisée à Bure et autour ï »¿.

« Le contexte s’avère très brûlant, le contexte à la fois national avec la relance du nucléaire et local avant les expropriations », expose June. L’objectif est d’opérer un point d’actualité concernant le projet d’enfouissement des déchets nucléaires et plus globalement la lutte antinucléaire dans le Sud meusien. « C’est hyperimportant en ce moment. Bure demeure très stratégique dans la lutte contre la filière nucléaire qui a besoin de Cigéo pour être complètement validée. »

Retour en arrière, dans les années 80 quand l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) commençait à prospecter des sites en France… L’évocation historique prend un aspect spectacle dans sa première partie, avec la présence de quelques hommes « caricaturés » pour le rôle qu’ils ont pu jouer dans l’implantation du labo à Bure, puis dans la mise en œuvre du programme de stockage des déchets nucléaires à la limite de la Meuse et de la Haute-Marne.

Une lutte qui s’est « diversifiée »

Il est question de la « fabrique du consentement », ou le récit de ce qui a été entrepris pour faire accepter la nucléarisation du territoire. On parle aussi de « la structuration de l’opposition » marquée par une installation dans des lieux devenus symboliques : la Maison de la résistance dès 2004, puis la gare de Luméville, plus récemment L’Augustine et L’Affranchie… « pour ancrer la lutte » autant que « pour rassembler les gens ».

On n’oublie pas l’occupation du bois Lejuc, ni « une phase plus répressive » qui a suivi.

Et aujourd’hui ? « Il y a une relance » grâce à des mouvements qui « redonnent de l’énergie pour lutter de manière différente ». Les antinucléaires saluent le travail que continuent d’effectuer des organisations telles que Bure Stop, le Cedra, Meuse nature environnement etc. « Il existe aussi une tactique plus offensive, on n’a pas envie d’opposer les deux manières » de résister.

« La lutte s’est diversifiée », elle s’est aussi remobilisée suite à la déclaration d’utilité publique en 2022 qui ouvrait la voie à des expropriations, une menace qui se précise. La gare de Luméville va être concernée, et certains de se demander : « Comment on veut la défendre ? Et jusqu’où la défendre ? »

Après environ deux heures, l’atelier « Tréfonds de mon cœur » s’est terminé. Mais les Rencontres printanières antinucléaires continuent jusqu’à ce mardi, avec encore des conférences, des ateliers, des projections, des balades.
« On verra d’autres événements… »

« Ce sont quelque 70 activités qui auront été proposées durant une semaine », souligne Colin, membre de l’équipe qui l’a préparée. C’est plus que celles qui avaient été initialement programmées en plusieurs endroits : « Mais on avait laissé des créneaux libres pour ceux qui voudraient en rajouter spontanément. »

Autre satisfaction, à propos de la participation : « Ce sont 350 personnes qui seront passées durant la semaine, on estime de 250 à 270 ce week-end. C’est plus que ce que l’on attendait. » La multiplicité des sujets abordés, l’ambition de donner une vision prospective l’expliquent. Sans négliger « un souci de faire se croiser les luttes, se rencontrer les initiatives. De trouver des luttes qui nous paraissent pertinentes pour essayer de sortir peut-être d’un entre-soi avec juste les antinucléaires de Bure. »

« S’il s’agit d’un événement ponctuel », répond Colin « on verra d’autres événements comme celui-là aussi longtemps que les espaces, on les aura. » June d’ajouter : « On ne formule pas de faire la même chose. À chaque fois, on réunit les énergies qui existent et l’événement est un peu différent. »