« On voit les bulldozers à l’horizon » : À Bure, les expropriations se poursuivent
OUEST-FRANCE
18/08/2024
Les opposants au projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure (Meuse) se réunissent ces 16, 17 et 18 août. L’occasion de revenir sur la phase d’expropriation, lancée en mars dernier, par les porteurs du projet.
Ce week-end, les opposants au projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure (Meuse) se retrouvent pour la quatrième édition du festival Bure’lesques. Porté par l’État depuis plus de vingt ans, le projet de centre industriel de stockage géologique (Cigéo) vise à enfouir, à 500 mètres de profondeur, 85 000 mètres cubes de déchets nucléaires de moyenne et haute radioactivité.
La phase d’expropriation est lancée
En mars, l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), pilote du projet, a mis un coup d’accélérateur en lançant la phase d’expropriation, permise par la déclaration, en 2022, « d’utilité publique ». Plus de 300 propriétaires, majoritairement des agriculteurs, sont concernés. « C’est un passage en force », fustige Angélique Huguin, membre du front juridique contre Cigéo.
Jusqu’à présent, l’Andra a acquis les parcelles, nécessaires à la construction du laboratoire expérimental et des deux kilomètres de galeries souterraines, à l’amiable, « en échange d’une indemnité ou d’autres terres ». Et même si elle ne dispose toujours pas de l’autorisation de création, plus de 80 % des terres nécessaires au projet sont déjà entre ses mains.
Reste maintenant les parcelles situées le long de la voie ferrée, où ? transiteront les colis de déchets, ainsi que l’ancienne gare de Luméville-en-Ornois (Meuse), devenue un haut-lieu de la lutte.
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Ces acquisitions concernent à la fois la surface et les « tréfonds ». Car, pour enfouir les déchets entre 200 et 500 mètres de profondeur, l’Andra doit être propriétaire du sous-sol. « Les agriculteurs, encore propriétaire de la surface, peuvent alors continuer à cultiver au-dessus des déchets nucléaires », résume, avec ironie, Angélique Huguin.
Une prise de conscience
D’après les opposants, dont certains mobilisés depuis les années 90, date des premières recherches lancées par l’Andra, cette phase d’expropriation a provoqué un « état de sidération ». « Les gens commencent à prendre conscience de la dangerosité du projet », souligne Corinne François, membre historique du collectif Stop Bure, créé en 1994. Une opinion partagée par Angélique Huguin. « On voit les bulldozers à l’horizon », confie-t-elle.
Dans un avis publié fin juin, l’Autorité environnementale questionne le « risque de dissémination de la radioactivité » dans l’environnement et ses conséquences pour la santé. Pour les deux militantes, une chose est sûre : si le projet venait à se concrétiser, les villages se videront de leurs habitants. « Qui voudrait rester vivre à côté d’un tel trafic radioactif ? », conclut Corinne François.