L’Union - Thomas Duprat - 3.09.09

L’article de l’Union ici :

« Je veux héberger les déchets radioactifs »

Après les défections de deux communes de l’Aube, Bertrand Courot veut que son territoire accueille un centre d’enfouissement.

LA première phrase qu’il prononce lorsqu’on aborde le sujet est : « Je sais que ce n’est pas très populaire ». Ça ne fait rien, il ne veut pas lâcher l’affaire même conscient des difficultés auxquelles il s’expose.

Bertrand Courot, maire de Sainte-Menehould et président de la communauté de communes, se frotte déjà les mains. Pourquoi ? Parce que deux communes auboises, à savoir Auxon et Pars-lès-Chavanges, ont laissé tomber le projet de centre d’enfouissement devant les ruades provoquées par leurs candidatures et les fortes pressions des comités antinucléaires.

« Relancer l’Argonne »

D’ailleurs, cet épisode avait même coûté sa tête au maire de la commune d’Auxon qui a dû réunir un conseil municipal extraordinaire en plein été pour lui notifier sa démission, même si elle n’a toujours pas été officialisée par le préfet. Bertrand Courot n’a pas peur de cela.

Devant les difficultés humaines et économiques du secteur ménéhildien, le premier magistrat justifie la candidature de sa commune. « C’est un bon moyen de relancer l’activité économique. Si on peut profiter de cette aubaine, je ne vois pas pourquoi il faudrait s’exclure de la liste des candidats. Avec la défection de deux communes auboises, nous ne serons plus que sept sur les rangs. Les conseils municipaux de l’Aube ont voté contre, je pense soumettre très rapidement la question sur la table ménéhildienne. Je suis convaincu que ce centre d’enfouissement de déchets à très faible radioactivité peut avoir les meilleures conséquences pour une zone mono-industrielle comme l’Argonne. »
Dans les faits, le dossier de candidature de Sainte-Menehould sera de nouveau remis aux techniciens de l’Andra, l’agence pour la gestion des déchets radioactifs qui donnera suite ou non à la candidature ménéhildienne. Reste à obtenir l’approbation du conseil municipal pour l’enfouissement de ces déchets à « faible radioactivité » mais à « longue vie » (FA-VL).

Verdict prochainement

« Le secteur de Sainte-Menehould dispose de beaucoup de terres inoccupées, notamment de grands espaces boisés et des zones de cultures. La construction et l’entretien d’un tel centre d’enfouissement seraient bénéfiques aussi sur le plan humain. Les particuliers du secteur pourraient y trouver leurs comptes, notamment les hôteliers et les restaurateurs. Peut-être même que certains seront convaincus de rester et de vivre à Sainte-Menehould », espère l’élu.

« Il est trop tôt pour donner un échéancier précis. Ce qui est certain, c’est que lors du prochain conseil municipal, la question devrait être abordée. J’espère ne pas tomber sur des troupes trop disparates. Il faut tenter de dépassionner le débat. De toute façon, il faudra un vote du conseil municipal pour savoir si oui ou non, la ville peut postuler pour accueillir ce centre d’enfouissement. »

Quels que soient la décision et le vote du conseil, les oreilles du maire et président de la communauté de communes pourraient siffler dans les jours à venir. Et ce, sans attendre le prochain conseil municipal.


L’article ici :

Nicolas Lerouge, maire de Braux-Saint-Remy et leader du rejet du projet d’accueil du centre d’enfouissement de déchets répond à nos questions.

Quelle est votre réaction à la suite de l’annonce du maire de Sainte-Ménehould d’accueillir un centre d’enfouissement ?
Nicolas Lerouge : « Franchement je suis pris entre la stupéfaction et l’incompréhension. Comment peut-on vouloir accueillir un tel centre sur un secteur comme celui de l’Argonne. C’est sûr que cela pourrait rapporter beaucoup d’argent aux collectivités locales. Mais est-ce la seule priorité ? D’autre part, un rapport géologique de l’Andra stipule que les sols ne correspondent pas pour l’accueil d’un centre d’enfouissement. Peut-être que M. Courot n’en a pas connaissance ? »

Ce projet peut-il être favorable économiquement ?
N.L. : « Je ne vois pas comment. Les gens qui vont travailler dans ce centre sont de techniciens très spécialisés. il n’y aura pas plus de boulot pour les locaux. C’est une aberration de penser comme cela. D’autre part, on va foutre en l’air l’une des seules richesses de l’Argonne, sa forêt, parce que le centre d’enfouissement entraînera forcément une déforestation massive sur des dizaines voire des centaines d’hectares. Et si un jour malheureusement un centre voit le jour, pensez-vous réellement que beaucoup de techniciens hautement diplômés et bien rémunérés poseront leurs valises en Argonne ? C’est de l’utopie. »

Quelle peut être, selon vous, la réaction des élus réfractaires et des habitants ?
N.L. : « Je ne sais pas encore quelle tournure les événements vont prendre, mais une chose est sûre, s’il faut remonter au créneau on le fera. Nous avons déjà milité contre le centre d’enfouissement il y a quelques mois, ce ne devrait pas être difficile de retrouver les mêmes personnes, peut-être plus nombreuses même pour faire entendre nos voix. De toute façon, nous ne resterons pas les bras croisés. S’il faut faire du bruit, on en fera. »