Issus du traitement des combustibles usés des centrales nucléaires, les déchets radioactifs de haute activité sont actuellement entreposés à l’usine Areva de La Hague (Manche) mais une loi de juin 2006 a ouvert la voie à leur stockage en formation géologique dans une zone de 200 km² située au nord du laboratoire de Bure (Meuse) à l’horizon 2025.

Le projet rencontre cependant la résistance de nombreuses associations locales, tandis que le réseau Sortir du Nucléaire et Greenpeace s’y opposent en estimant que le principe de précaution est remis en cause et ou en évoquant une "bombe radioactive à retardement". "Une opposition (...) dans toute la France serait de nature, à terme, à tuer le nucléaire. Mais il y a de bonnes raisons de penser que cela ne se produira pas parce que, petit à petit, cela se fait ailleurs", a déclaré Bertrand Barré à Reuters lors d’une interview.

Il a ainsi cité les exemples d’un centre de stockage de déchets radioactifs militaires et issus de la recherche aux Etats-Unis, implanté dans le sud-est du Nouveau-Mexique et opérationnel depuis 1999, ainsi que des travaux en cours en Finlande. "En fonction des connaissances qu’on a aujourd’hui, le stockage géologique est la meilleure solution", a ajouté Bertrand Barré. "Dans la population française, on ne peut pas dire que les déchets nucléaires soient une hantise", a-t-il également estimé.

Areva, spécialiste de la fabrication de combustible nucléaire, indique sur son site internet que la production de déchets radioactifs pour chaque Français s’élève en moyenne à un kilo par an, dont cinq grammes de déchets de haute activité, c’est-à-dire dont la durée d’activité pourrait atteindre, selon Bertrand Barré, "100.000 à 200.000 ans".

BURE... OU AILLEURS

"Le problème de la gestion des déchets n’est en rien un problème de quantité de matière, c’est un problème de temps de confinement. Aujourd’hui, pour la première fois, on veut garantir que quelque chose ne bougera pas sur des périodes très longues", a souligné Bertrand Barré. Les recherches se poursuivent actuellement à Bure dans la perspective d’une demande d’autorisation de création d’une zone de stockage en 2015 et une mise en service en 2025.

"Si les gens de Bure disent ’pas chez nous’, ce serait bien le diable si on ne trouvait pas quand même - sur tout le bassin géologique parisien -, un autre endroit où les gens disent ’okay, mais vous nous donnez un dédommagement’. Ils vont demander des emplois", a estimé Bertrand Barré. "Dans ces endroits-là, ce qui les désole, c’est de voir les enfants partir et ne pas rester au pays. Trouvez des emplois au pays, fixez des gens au pays et vous pourrez bien mettre ce que vous voulez sous terre."

Un stockage à proximité du laboratoire de Bure se ferait ainsi dans une couche d’argile et empêcherait, selon Bertrand Barré, que des éléments "reviennent à la surface terrestre avant que leur radioactivité ait tellement diminué que cela n’aurait plus d’importance". Les centres de stockage de déchets sont exploités par l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs). Les déchets de très faible activité, principalement issus du démantèlement des installations nucléaires et affichant une radioactivité de l’ordre de quelques becquerels par gramme, sont stockés en surface dans un centre à Morvilliers (Aube).

Ceux de faible et moyenne activité à vie courte ont été stockés dans le département de la Manche puis, à partir de 1992, dans le centre de Soulaines (Aube). Concernant les déchets "de faible activité à vie longue" l’Andra a démarré en juin 2008 la recherche d’un site de stockage pour lequel le gouvernement, après consultations au niveau local, doit arrêter son choix fin 2010, l’ouverture étant prévue pour 2019. Réagissant à ce projet, 16 associations des régions Lorraine et Champagne-Ardenne ont demandé mercredi un moratoire sur l’enfouissement des déchets nucléaires.