REPUBLICAIN LORRAIN - 18/05/2017

La poursuite du projet Cigéo repose sur le vote, ce soir, des 11 élus de Mandres-en-Barrois. Dans un contexte très tendu, ils doivent se prononcer sur un échange de terrains.

Petit village meusien d’à peine 120 habitants, Mandres-en-Barrois pourrait voir sa population doubler, voire tripler, aujourd’hui, sur les coups de 18h. Les opposants au projet Cigéo d’enfouissement des déchets nucléaires français les plus dangereux – et par extension les nombreuses forces de l’ordre qui les accompagnent partout ! – s’y réuniront devant la mairie.

C’est sous cette pression que les onze élus locaux de cette commune voisine de Bure se prononceront sur le seul point à l’ordre du jour de leur conseil municipal : un simple échange de terrains au profit de l’Andra, l’agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs. Mais il est crucial pour la poursuite normale du projet. Elle passe par la prise du bois Lejuc. Enjeu de toutes les crispations depuis l’été dernier, cette forêt de 220 ha doit accueillir une partie des installations de surface et notamment les puits d’extraction et d’aération.

Déjà consultée en janvier 2013 sur le même sujet, la population avait voté contre à 85 voix et pour à 50. Deux jours plus tard, le conseil municipal avait entériné ce choix. Mais, le 2 juillet 2015, lors d’une séance menée à 6h du matin (!), les élus votaient à bulletins secrets cet échange, par 7 voix pour sur 11. Un scrutin qui s’est déroulé dans le non-respect du code des collectivités générales, a estimé le 28 février dernier le tribunal administratif. Sommant la municipalité de se prononcer à nouveau dans les règles de l’art.

Ambiance délétère

David Mazoyer, le directeur du centre Andra de Meuse/Haute-Marne, regrette le « manque de sérénité » autour de ce nouveau vote : « Les élus sont la cible de menaces et de désinformations, pour tenter de les intimider. » Depuis plusieurs mois, l’ambiance est effectivement délétère dans le village. « Il est divisé entre pros et antis et beaucoup d’habitants ne se parlent plus. Ils en ont aussi ras-le-bol de la militarisation de leur commune », témoigne l’un d’eux, opposé au projet. Fidèle à sa ligne de conduite silencieuse, le maire, Xavier Levet, surnommé par ses adversaires « le VRP de l’Andra » nous a raccroché au nez hier. « Il est très lâche de la part de l’Andra et donc de l’État de faire reposer cette décision si lourde sur onze élus d’un petit village alors qu’ils ont à leur disposition des outils comme l’expropriation », regrette Johann, un opposant de la Maison de la Résistance de Bure. Il espère un vote défavorable à l’Andra : « Cela permettrait de retarder encore le projet. » Une hypothèse que l’Andra n’envisage pas. Elle voit dans cette procédure « une simple régularisation » et affirme avoir des ressources en cas d’échec : « On a toujours des plans de repli divers et variés. Que ce soit au niveau juridique ou en s’installant sur d’autres terrains nous appartenant. »

Philippe MARQUE
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