Avis de l’Autorité environnementale : l’Andra doit revoir sa copie
COMMUNIQUE COLLECTIF + REVUE DE PRESSE
14/01/2021
Sûreté, choix de l’argilite de Bure, sismicité, impacts sur l’eau, schéma de transports, retour sur accidents dans le labo, risques pour les populations riveraines et l’environnement, développement économique du territoire et même géothermie, tout y passe et ce n’est pas bon du tout pour l’Andra. L’AE vient de rendre un avis explosif. L’Autorité environnementale critique ouvertement le dossier de demande d’utilité publique (DUP) déposé en août dernier par l’Andra.
Un avis très détaillé, ne laissant que très peu de zones d’ombre
Les associations signataires de ce communiqué relèvent l’ampleur de ce rapport, qui aborde de manière exhaustive et sans tabou de nombreux sujets soulevés depuis des années par l’opposition au projet de stockage géologique des déchets nucléaires. Et l’ensemble laisse une impression toujours aussi inquiétante : le dossier que présente l’Andra dans le cadre de la DUP est particulièrement incomplet, tronqué et trop léger *.
L’Andra doit revoir sa copie
Mauvaise prise en compte des enjeux environnementaux, sérieuses insuffisances de l’étude d’impact, minimisations des impacts de Cigéo sur le plan sanitaire, manque d’analyse des risques accidentels liés au projet, absence de démonstration de la réversibilité de l’installation en cas d’incident, remise en cause du choix du seul site de Bure sur le plan géologique, insuffisance de vision économique territoriale,… impossible de tout lister.
L’AE remet en cause l’assurance avec laquelle l’Andra communique depuis de trop nombreuses années quant à la « maturité » vantée du projet Cigéo
Elle relève des sujets passés sous silence : quid de l’analyse de l’accident mortel survenu dans le laboratoire en 2016, lors du creusement d’une galerie ? Comment l’ANDRA anticipe t-elle le risque d’un accident nucléaire majeur ?
Quid de la sismicité locale, Cigéo se trouvant à 2 km du fossé de Gondrecourt, faille géologique ? Elle rappelle qu’une faille dite « éteinte » peut toujours se réveiller, preuve récente à l’appui*.
Elle ressort même ledossier géothermie, la ressource naturelle localisée sous Bure ayant été scandaleusement escamotée par l’Andra, et recommande de nouvelles expertises indépendantes.
Un calendrier intenable au regard du caractère hors norme de ce projet
L’agence communiquait dernièrement dans l’Est républicain (09/01 2021) sur « une année charnière » pour Cigéo, avec une phase d’enquêtes publiques mi-2021 dans le cadre de la DUP et une demande de création de Cigéo fin de l’été prochain. On reconnaît bien là le trop plein d’optimisme de l’Andra, qui prêterait à sourire si l’enjeu autour de ce chantier d’enfouissement n’était aussi phénoménal.
On voit mal comment ce calendrier pourrait tenir , à moins de complaisance politique inexcusable. Le dossier Andra n’est absolument pas apte à aller en enquête publique !
Les associations Burestop 55, Cedra 52, Cacendr, Eodra, Bure Zone Libre, Habitants vigilants de Gondrecourt vont étudier avec soin l’ensemble de cet avis qui ne fait que confirmer les nombreuses craintes exprimées depuis des années.
Elle comptent interpeller prochainement leurs élus locaux ainsi que le Ministère de l’environnement quant à la suite à donner à une telle remise en question. Le dossier immature produit par l’Andra ne peut servir ni de socle, ni de laisser-passer à des enquêtes publiques - le terme public prend tout son sens- qui seraient alors faussées, donc incroyablement anti-démocratiques.
* Rappelons l’inconsistance du dossier du maître d’ouvrage (Andra) présenté lors du débat public de 2005, déjà fortement dénoncée par les opposants au projet Cigéo.
L’AEN relève ici un sérieux manque de données chiffrées, de report à des études en cours. La conception du stockage pour répondre aux questions de sûreté soulevées par l’IRSN et l’ASN, tout comme la méthodologie d’analyse des impacts sur les populations riveraines et l’environnement restent à fournir encore ou à compléter.
** AVIS AE : page 55
REVUE DE PRESSE
LE MONDE - 22/01 2021
Déchets nucléaires : l’Autorité environnementale livre son avis sur le projet de stockage à Bure
L’USINE NOUVELLE - 19/01 2021
L’Autorité environnementale critique sur le projet Cigéo d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure
ACTU ENVIRONNEMENT - 19/01 2021
Cigéo : pourquoi l’Autorité environnementale émet de vives critiques
REPORTERRE / 15 janvier 2021
Déchets nucléaires : une note « explosive » souligne les lacunes du projet Cigéo
AFP - 18/01/2021
Déchets nucléaires à Bure : l’Autorité environnementale publie un avis détaillé
"La prise en compte des enjeux environnementaux n’apparaît pas toujours suffisante", a relevé lundi l’Autorité environnementale (Ae) qui a donné ses recommandations sur le dossier controversé d’enfouissement souterrain de déchets nucléaires à Bure, dans la Meuse (projet Cigéo).
L’Ae a rendu un avis détaillé qui s’inscrit dans le dossier de la Demande d’utilité publique (DUP) que l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a publié en novembre. Cette DUP devrait être examinée dans le courant du premier semestre.
Dans la synthèse de son avis, l’Autorité environnementale, qui n’a pas fonction à se prononcer en faveur ou non du projet, a estimé que "l’analyse des risques et des impacts, à long et très long termes, a vocation à être complétée et affinée à l’occasion des actualisations successives de l’étude d’impact, et particulièrement pour la demande d’autorisation de création de l’installation de stockage".
Il est ainsi recommandé à l’Andra de mieux démontrer le caractère asismique du sous-sol pour justifier l’implantation du site, et de reprendre par ailleurs les études du potentiel géothermique du sous-sol de Bure par des géologues indépendants. Concernant les alternatives à l’enfouissement à Bure, l’Ae a relevé que "l’examen des solutions de substitution s’est appuyé sur une connaissance encore imparfaite de l’état initial, ce qui suggère que la prise en compte des enjeux environnementaux pourrait être meilleure".
"De façon générale, tant pour ce qui concerne le traitement des déchets, le type de stockage, le choix de la couche d’argilite, l’implantation exacte des installations du projet que pour l’avenir du territoire qui le porte, la prise en compte des enjeux environnementaux n’apparaît pas toujours suffisante", a insisté l’Ae. "D’autres incertitudes quant aux incidences sur les sites Natura 2000 et aux impacts sur les milieux aquatiques doivent également être levées", a-t-elle ajouté.
L’Ae a enfin fait reproche à l’Andra de ne pas présenter de "rapport de sécurité sur le site" en lui-même dans le cadre de sa demande de DUP. "Il est nécessaire de se référer à d’autres études et dossiers pour avoir une vision de la maîtrise des risques sur le site", a-t-elle regretté, remarquant que "l’étude d’impact n’aborde pas les situations accidentelles ou ne le fait que ponctuellement pour ce qui concerne les eaux".
Les opposants au projet meusien ont repris les critiques de l’Ae. "L’Ae ne se contente pas de mettre en doute la maturité du projet, soulignant que la possibilité de récupérer les déchets n’est toujours pas démontrée ; elle met également en évidence un nombre très important d’informations manquantes sur des sujets cruciaux", a fait observer le Réseau Sortir du Nucléaire, constatant aussi que cet avis corrobore "les critiques portées depuis près de 20 ans par les acteurs associatifs’.
Pour le Collectif Meuse contre l’enfouissement des déchets radioactifs, l’Ae a émis un "avis explosif". "Sûreté, choix de l’argilite de Bure, sismicité, impacts sur l’eau, schéma de transports, retour sur accidents dans le labo, risques pour les populations riveraines et l’environnement, développement économique du territoire et même géothermie, tout y passe et ce n’est pas bon du tout pour l’Andra", a commenté l’association.
L’Andra doit répondre à l’avis de l’Ae avant l’ouverture de l’enquête publique prévue dans le cadre de cette DUP.
RTL avec AFP 18.01.2021
Déchets nucléaires à Bure : l’Autorité environnementale met des conditions
https://5minutes.rtl.lu/actu/frontieres/a/1648887.html
CONNAISSANCE DES ENERGIES avec AFP 18.01.2021
https://www.connaissancedesenergies.org/afp/dechets-nucleaires-bure-lautorite-environnementale-met-des-conditions-210118-0
LIBERATION 15.01.2021
Déchets nucléaires à Bure : les « incertitudes » de l’Autorité environnementale
Selon un avis de l’AE, le dossier d’enquête publique du controversé projet d’enfouissement Cigéo, dans le Grand-Est, n’est pas assez précis au vu de « l’éventail très large des risques ». Les opposants saluent un « avis explosif »
https://www.liberation.fr/terre/2021/01/15/dechets-nucleaires-a-bure-les-incertitudes-de-l-autorite-environnementale_1817692
LE FIGARO / Economie 18.01.2021
Déchets nucléaires à Bure : l’Autorité environnementale met des conditions
https://www.lefigaro.fr/flash-eco/dechets-nucleaires-a-bure-l-autorite-environnementale-met-des-conditions-20210118
JOURNAL DE L’ENVIRONNEMENT 18.01.2021
Cigeo : l’Ae pas convaincue par le dossier de l’Andra
https://www.journaldelenvironnement.net/article/dechets-nucleaires-l-ae-pas-convaincue-par-le-dossier-de-l-andra,113298
EST REPUBLICAIN - 17/01 2021
Bure : l’Autorité environnementale multiplie les recommandations sur le projet de stockage des déchets nucléaires Cigéo
https://www.estrepublicain.fr/environnement/2021/01/18/bure-l-autorite-environnementale-multiplie-les-recommandations-sur-le-projet-de-stockage-des-dechets-nucleaires-cigeo
Bure : l’Autorité environnementale multiplie les recommandations sur le projet de stockage des déchets nucléaires Cigéo
S’il ne lui appartient pas de se positionner sur l’opportunité de mener ou non le projet de stockage souterrain des déchets nucléaires, l’Ae a rendu un avis détaillé dans le cadre de la demande de DUP (déclaration d’utilité publique) par l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs).Le document fait 56 pages. L’avis rendu le 14 janvier par l’Autorité environnementale (Ae) sur le projet de centre de stockage des déchets nucléaires Cigéo, à Bure (Meuse) , est en effet très détaillé et aborde toutes les problématiques : conception technique, implantation, choix de l’argile, sécurité, réversibilité, étude d’impact, incidences sur les milieux (naturels, humains), dispersion de la radioactivité… jusqu’au développement du territoire.
Les associations opposées à l’enfouissement qualifient cet avis « d’explosif » et considèrent que l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) « doit revoir sa copie ».
« L’avis ne lui est ni favorable ni défavorable et ne porte pas sur son opportunité », est-il rappelé en préambule. Mais l’Ae multiplie les observations et plus encore des recommandations, beaucoup s’apparentent à des critiques. Ce n’est pas le premier rapport qu’elle effectue sur le projet , cette instance indépendante a fait l’objet d’une saisine habituelle à l’occasion du dépôt du dossier de demande de DUP (déclaration d’utilité publique).Les enjeux environnementaux pas suffisamment pris en compte
Et de rappeler que les principaux enjeux environnementaux pour elle sont la sécurité une fois le stockage achevé, la propagation de la radioactivité, la préservation de la santé humaine, la protection des milieux naturels et de la biodiversité. « La prise en compte des enjeux environnementaux n’apparaît pas toujours suffisante », lit-on. « En particulier, les perspectives de développement économique et démographique territorial reposent sur une vision de court terme et n’envisagent pas suffisamment d’options pour maîtriser la vulnérabilité du territoire à long terme. » Il est aussi regretté que le dossier ne présente pas de rapport de sécurité. L’Ae aimerait disposer d’un « programme détaillé d’études complémentaires de maîtrise des risques et de surveillance ». S’ajoute : « D’autres incertitudes quant aux incidences sur les sites Natura 2000 et aux impacts sur les milieux aquatiques doivent également être levées. » On relève par ailleurs que le dossier « ne comporte pas d’éléments sur les impacts ni sur la sûreté de la chaîne de conditionnement et de transport des déchets ».
Absence d’évaluations sanitaires et manque de stratégie en cas d’accident mis en exergue. La question de la surveillance après fermeture du stockage se trouve abordée, il est réclamé une présentation de ce que l’Andra envisage à long terme, et avec quels moyens.
Pas trop tard pour étudier d’autres types de rocheAutre suggestion qui retient l’attention, c’est de « comparer les avantages et les inconvénients environnementaux, y compris à long terme, des différents types de stockage pour pouvoir démontrer que le choix de la couche d’argilite du Callovo-Oxfordien est bien le plus adapté pour engager aujourd’hui l’avenir sur plusieurs millénaires ». Alors que le dépôt de la demande d’autorisation de création, déjà plusieurs fois différé, devrait avoir lieu cette année, n’est-ce pas un peu trop tard pour étudier d’autres types de roche ? Le choix « s’est trouvé in fine extrêmement réduit », note l’Ae. Cependant « les enjeux de ce projet et l’échelle de temps des effets de choix nécessitent une démonstration solide par rapport aux alternatives possibles ». Il lui semble qu’il n’est pas trop tard pour le faire.
Analyser le risque de ne pas pouvoir récupérer les colis
Ne passe pas non plus inaperçue la demande de « justifier […] le projet de développement du territoire qui en l’état actuel augmente le niveau d’enjeu face au risque d’exposition à la radioactivité et risque de banaliser le territoire ».
Dernier point sensible, et pas des moindres puisqu’il a fallu l’adoption d’une loi pour l’imposer, c’est le sujet de réversibilité. « La possibilité de récupérer les colis constitue un élément clé […] Il est donc fondamental que le projet s’appuie sur une analyse approfondie des conséquences du risque de ne pas pouvoir les récupérer. »
L’Andra dispose de deux mois pour répondre aux formulations de l’Ae. Sans repartir de zéro, suivre ne serait-ce que les recommandations majeures à défaut de l’ensemble ferait forcément perdre beaucoup de temps au projet.
ENCADRES
« Démontrer le caractère asismique de la couche géologique »
Au chapitre de la stabilité du sous-sol, l’Autorité environnementale recommande de « mieux caractériser le fonctionnement et la dynamique du fossé de Gondrecourt afin d’étayer la justification du lieu d’implantation des ouvrages souterrains », mais surtout de « démontrer que le caractère asismique de la couche géologique de la zone d’implantation des ouvrages reste avéré à l’aune des nouveaux éclairages sur la sismicité en France à la suite du séisme du Teil en 2019 ». Ce dernier, survenu en Ardèche en novembre 2019 , pourrait, en effet, avoir une cause humaine. On soupçonne que l’exploitation d’une carrière au-dessus d’une faille géologique puisse se trouver à l’origine des mouvements observés de la croûte terrestre. Plus près de là, l’exploitant de la centrale géothermique de Fonroche à Vendenheim (Bas-Rhin), au nord de Strasbourg, a reconnu sa responsabilité concernant l’origine de plusieurs secousses ressenties au mois de décembre.
De nouvelles études géothermiques du sous-sol de Bure souhaitées
Le potentiel géothermique du sous-sol de Bure n’est pas nouveau. Dès le début des années 2000 on l’évoquait, puis il a refait surface régulièrement. Alors que selon l’étude du laboratoire suisse Géowatt AG, il existe une vraie ressource, l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) l’a toujours minimisée. L’affaire a même été portée devant la justice par les adversaires à l’enfouissement des déchets nucléaires. Mais on pensait l’affaire tranchée depuis que ces derniers avaient été déboutés par la justice : en mai 2018, la Cour de cassation a validé la décision de la cour d’appel de Versailles du printemps 2017 , qui avait donné une nouvelle fois raison à l’Andra après u n premier jugement favorable rendu par le TGI de Nanterre deux ans plus tôt. L’Autorité environnementale, toutefois, demande « de reprendre les études du potentiel géothermique du sous-sol et d’organiser leur pilotage par un groupe de géologues indépendants ». Elle estime que « compte tenu de l’importance de ce sujet qui conditionne l’éventuelle faiblesse du risque d’exploitation du sous-sol, cette question devra être sérieusement approfondie pour les autorisations ultérieures »
Notre analyse des principaux points relatifs à l’avis de l’Ae