Un centre souterrain de déchets ultimes à - 550 m de profondeur creusé sous une nappe phréatique. Un site présentant des "conditions exceptionnellement favorables", un stockage réversible, des emplois, une manne financière, un "pôle environnement", un CLIS....
Stockamine et Bure ne ressemblent-ils pas comme deux frères jumeaux ?
Autre point commun, le Directeur de la DRIRE Alsace (1995-99) lorsque le site a été autorisé (1997), l’X-mines Pierre-Franck Chevet, vient d’être nommé à la tête de l’Autorité de Sûreté Nucléaire, donc "gendarme" de l’Andra pour Bure notamment.

1999 : Exploitation du site

Ce centre souterrain de déchets ultimes à 500 mètres de profondeur est situé au-dessous de la nappe phréatique la plus grande d’Europe, celle du Rhin.
Il se situe à Wittelsheim / Alsace (Haut-Rhin)

En février 1999, après près de dix ans de réunions publiques et de commissions d’experts, et de méfiance des riverains, Stocamine ouvre ses portes. Aux habitants et aux associations écologistes locales qui s’inquiètent, les dirigeants martèlent que « les déchets peuvent être remontés à tout moment ». «  On a tous avalé l’idée d’un possible déstockage. C’est comme cela que le projet est passé  », dit Jean-Pierre Hecht, représentant du personnel de Stocamine.
Ce site est présenté comme exceptionnellement favorable à ce type de stockage souterrain de déchets dits « ultimes ». Un CLIS de surveillance est installé. Sont promis des emplois, un pôle environnement, beaucoup d’argent et la réversibilité.
« On nous a bien dit que c’était des produits toxiques, qu’on allait les enterrer sous nos pieds, mais on nous a promis que tout était sécurisé. J’y ai cru, sans doute aussi parce que j’avais envie d’y croire  » [un employé de Stocamine]
« Officieusement, on reconnaît que « des erreurs ont été commises », que « promettre la réversibilité des déchets aux habitants, ça a été une connerie ».

10 septembre 2002 : le site « totalement sécurisé » prend feu

Un incendie se déclare dans les galeries et consume des déchet pendant deux mois.
Les mineurs présents sur les lieux aident les secours et sont dangereusement exposés. « C’est grave. Ils les ont envoyés au casse-pipe avec de simples blousons de mineurs. Sans protection. Seuls les pompiers disposaient d’un équipement spécial », explique l’un de leurs avocats, André Chamy.
Fumées toxiques, coût faramineux, déformation des galeries…
Que faire ? Une bombe à retardement gît à 500 mètres de profondeur, menaçant de contaminer l’ensemble de la nappe phréatique.
Deux hypothèses ont été proposées par la préfecture : remonter les déchets à la surface – une opération estimée à 100 millions d’euros – ou refermer la mine pour 50 millions d’euros.


28/09/2002 selon LIBERATION

(...) Depuis le début de l’exploitation, en février 1999, Stocamine n’a eu de cesse de vanter sa fiabilité : « Un service à l’environnement », « un site exceptionnellement sûr », proclament ses brochures publicitaires. Les experts expriment désormais des doutes sur la rigueur des procédures d’admission ­ théoriquement drastique ­ des déchets. Des prélèvements ont été effectués dans des big bags, dont certains provenaient de l’incendie d’un entrepôt de produits sanitaires ayant eu lieu en août. Tous les produits stockés étaient-ils autorisés ? Les procédures d’acceptation ont-elles été régulières ? Tous les déchets ont-ils été soigneusement identifiés avant le stockage ?
Jusqu’à présent, les principales craintes suscitées par Stocamine tenaient essentiellement aux risques de pollution de la nappe phréatique et aux éventuelles conséquences de secousses sismiques. Un incendie comme celui du 10 septembre était censé ne jamais arriver : « Nous avions envisagé le pire incendie qui puisse se produire, celui sur un engin de manutention », remarque Nicolas Imbert, chef de la division protection de l’environnement à la Drire.

2004 : un amendement sur mesure
Un amendement sur mesure passe à l’Assemblée nationale prévoyant « qu’au bout d’un an d’inactivité, les centres de stockage souterrain de produits dangereux deviennent des centres de stockage définitifs ». En France, seul le site de Stocamine est concerné par cette disposition législative.


Selon l’AFP I 14.09.2010

Le rapport, commandé en 2008 par le ministre de l’Ecologie, est daté de juin 2010. Il examine la solution d’une récupération totale ou partielle des déchets et celle de leur confinement à durée illimitée.Selon ses auteurs, l’ingénieur général des mines Marc Caffet et l’ingénieur en chef des mines Bruno Sauvalle, "le massif de sel (...) s’est déjà refermé sur les colis de déchets stockés dans les galeries souterraines, rendant très délicate et vraisemblablement dangereuse leur extraction"."Le choix du confinement définitif conduirait pour sa part à un ennoyage (submersion du site, NDLR) à horizon de 100 à 150 ans" et à "un risque de remontée par les puits d’éléments dangereux, à un horizon encore plus lointain (estimée à environ 600 ans après l’ennoyage)", poursuivent-ils. Cette remontée pourrait rendre "l’eau de la nappe (phréatique, NDLR) impropre à la consommation en aval immédiat des deux puits qui desservent actuellement le stockage", craignent-ils.Les auteurs recommandent la recherche d’une "solution qui s’efforcerait de déstocker en toute sécurité le maximum de colis (...) tout en prévoyant les mesures pour maîtriser le potentiel de pollution résiduel de ceux qui ne pourraient pas l’être".


2012 : enfouir ou déstocker ?

L’ALSACE.fr - 11/09/2012 à 05:00 par Laurent Bodin
Enfouir ou déstocker ? Tout ou partie ? Le dossier Stocamine, dix ans après l’incendie survenu dans le bloc 15, à plus de 500 mètres sous terre, à Wittelsheim, tient à ces deux questions. Les réponses, elles, viendront de Paris, du ministère de l’Écologie après arbitrage à Matignon.
Officiellement, la question du coût n’est pas supposée influer sur le choix de l’actionnaire. Sauf que le patron de Stocamine évalue la facture de l’enfouissement à 100 millions d’euros et celle du déstockage à 200 millions. Logique, dans ces conditions, que l’État ne soit pas pressé. Sauf que le temps presse et que dix ans ont déjà été perdus. « Au-delà de l’énorme gâchis du projet industriel, je regrette que rien n’ait été fait durant ces dix années. Il y a surtout eu beaucoup de phraséologie », souligne Jean-Claude Lostuzzo, délégué mineur (CGT) à l’époque de l’incendie.

« Immédiatement après, j’avais fait un rapport à la Clis dans lequel je demandais que la réversibilité soit mise en œuvre, notamment pour les produits ayant provoqué l’incendie. Ceux qui avaient le pouvoir n’avaient pas le savoir et ceux qui avaient le savoir n’avaient pas le pouvoir  », regrette encore Jean-Claude Lostuzzo qui ajoute : « Si on déstocke, qui va le faire, sachant qu’il n’y a plus de mineurs, sauf la poignée qui travaille encore à Stocamine ? »,
Depuis des années, plusieurs rapports ont montré que l’évolution de la mine rend, au fil du temps, de plus en plus difficile la mise en œuvre de la réversibilité. « Je ne comprends pas pourquoi on ne commence pas à déstocker ce qui est facilement accessible, quitte à adapter, ensuite, le mode opératoire  », confie Jean-Pierre Hecht, porte-parole du syndicat CFDT Mines de potasse. Et de se souvenir qu’en 2001, il avait dû, avec ses collègues de Stocamine, remonter du fond des déchets non conformes. Mais c’était à l’époque où Stocamine apparaissait comme un moyen de poursuivre une activité minière, même modeste, dans le Bassin potassique.

Une direction menaçante
Les 16 salariés de Stocamine n’ont qu’à bien se tenir. Dans une « Note au personnel » datée du 28 juin, la direction se fait menaçante, rappelant les salariés à « l’obligation de loyauté envers l’employeur […] tant dans l’enceinte de l’entreprise qu’à l’extérieur de celle-ci ». Au cas où le personnel n’aurait pas compris qu’il doit quotidiennement louer les mérites de son employeur, la direction de Stocamine ajoute, références de jurisprudences à l’appui, que « les tribunaux considèrent de longue date que le fait pour un salarié de manifester, publiquement ou non, son désaccord sur la politique de l’entreprise constitue au minimum une cause réelle et sérieuse de son licenciement ». Et de promettre des « mesures disciplinaires » à l’encontre de tout salarié qui se montrerait critique. Depuis cette note, la situation est quelque peu tendue au sein de Stocamine mais au moins, les gens se taisent…

RESSOURCES / le site de l’association d’opposants :
http://www.destocamine.fr/

VOIR LES VIDEOS :

http://www.dailymotion.com/video/xtez3n_stocamine-dix-ans-apres-l-incendie_news

http://www.dailymotion.com/tag/ecologie-destocamine-stocamine-alsace/1

Photo L’ALSACE