Pendant deux ans, un baron de la politique locale en région Lorraine (aujourd’hui Grand-Est) a participé à un tour de passe-passe budgétaire en attribuant plus de 3,5 millions d’euros de fonds publics à des communes de son fief électoral, au delà du cadre prévu par la loi pour les financements concernés. A l’origine de cette opération, la cagnotte de 60 millions d’euros de subventions déversées tous les ans pour « accompagner » le projet Cigéo, un centre d’enfouissement géant que l’État, via l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), cherche à creuser dans les sous-sols de Bure et de Saudron, deux petites communes rurales en Meuse et en Haute-Marne.

Élu local depuis 1985 sous diverses étiquettes centristes, Christian Namy est au centre de cette affaire. Cet homme politique est devenu président du Conseil départemental de la Meuse (Grand-Est) en 2004 et a ensuite été, de 2011 à septembre 2017, l’un des deux sénateurs du département, avant de soutenir la candidature d’emmanuel Macron à la présidentielle. Sous son autorité ont été « réorientés », en deux ans, près de 3,7 millions d’euros. Il n’est pas question ici de dessous-de-table en liquide ou autres dissimulations. Sous l’autorité de l’élu, une partie des « fonds d’accompagnement » du projet Cigéo – destinés à favoriser son « acceptabilité » par la population, notamment en finançant généreusement les infrastructures locales – ont été réaffectés aux budgets de petites communes qui n’y avaient, en principe, pas droit.

Il se trouve, par ailleurs, que les élus locaux qui réclamaient cette faveur étaient aussi des « grands électeurs » de Christian Namy, seuls habilités à voter dans le cadre d’une élection sénatoriale : les conseillers généraux, maires et conseillers municipaux des communes rurales du département. Les dernières tractations se sont même déroulées alors que Christian Namy était en pleine campagne électorale, sur la période 2010-2011. Faut-il y voir un lien de cause à effet ?

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