L’Union / Aurélie Juillard 13.02.09

Déchets nucléaires : salle comble pour les anti-enfouissement !


110 personnes ont assisté à la réunion publique contre l’enfouissement des déchets nucléaires à Blesme, Scrupt ou Maurupt.

"On a élu des gens à la mairie mais, même seulement pour être volontaire à l’accueil de déchets nucléaires, j’aurais voulu être consultée !" La salve nourrie d’applaudissements qui a accueilli les propos d’une participante suffirait à dépeindre l’atmosphère de la salle des fêtes de Blesme. Une bonne centaine de personnes avaient fait le déplacement pour la réunion publique organisée par le Collectif contre l’enfouissement des déchets radioactifs, le Cedra, et l’Association des élus meusiens et haut-marnais opposés à l’enfouissement des déchets radioactifs, l’AEMHM, à l’initiative de quelques habitants. A l’ordre du jour, évidemment, la candidature de Blesme, Maurupt-le-Montois et Scrupt à l’accueil d’un site de stockage de déchets radioactifs de faible activité à vie longue.

"On a de gros doutes, moi je suis prête à déménager si cette implantation se confirme", a lancé Mme Simon, à l’origine avec son époux d’une première lettre ouverte il y a une quinzaine de jours (notre édition du 31 janvier), au terme de l’exposé des représentants du Cedra et de l’AEMHM. "J’ai 69 ans et j’espérais que quelqu’un se lèverait à ma place, mais il n’y a eu personne. Alors maintenant que nous sommes tous réunis, que fait-on ?" Le maire de Blesme, Claude Doyen, présent dans la salle, a alors été interpellé par plusieurs de ses concitoyens de façon très claire : "Allez-vous, oui ou non, revenir sur votre position et revoter ?" Réponse de l’intéressé : "J’ai accepté la réunion de ce soir et j’ai voté la délibération de candidature en croyant bien faire. Maintenant, au terme de cette réunion, j’aimerais entendre un autre son de cloche pour me faire une opinion. Et de toute façon, on consultera la population si notre candidature est retenue."

"Un choix irréparable"

Une proposition loin de satisfaire l’assemblée après avoir écouté les arguments très convaincants des militants anti-enfouissement. "Plusieurs points posent problème", a en effet rappelé le représentant du CEDRA. "Le contenu de la poubelle qui sera sous nos pieds, puisqu’on nous parle de 170.000 mètres cubes, mais l’Andra (N.D.R. : Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, en charge du projet) dit que 50.000 m3 supplémentaires sont déjà fort probables ! La durée de toxicité est très forte, 3 millions d’années par exemple pour le chlore 36 ! Enfin, on nous dit que ces déchets sont peu radioactifs, mais cela se chiffre en milliers ou millions de becquerels tout de même !" Des arguments étayés par plusieurs enquêtes consultables sur Internet, a commencé par celle de la Commission nationale d’évaluation des recherches sur la gestion des déchets nucléaires (CNE) et de l’Autorité de Sûreté Nucléaire (ASN). Le maire de Beurville, Jacques Leray, représentant l’AEMHM, a poursuivi, interpellant les conseillers : "Sommes-nous vraiment mandatés par notre population pour un projet arrivant en pleine mandature et ayant un impact sur l’image de la commune pour des millions d’années ? Ne faites pas un choix irréparable que les générations futures pourraient vous reprocher !"

Et d’évoquer les retombées négatives en terme d’image, d’immobilier ou encore de santé de l’arrivée "d’une poubelle atomique à côté de chez soi". Le Cedra a enfoncé le clou : "Certaines communes volontaires ont redélibéré pour revenir en arrière..."

La balle est donc dans le camp des élus.

Une autre réunion publique est prévue à Maurupt-le-Montois jeudi prochain à 20 h 15 à la salle polyvalente.


Une procédure quelque peu floue...

C’est l’été dernier que l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) a envoyé un dossier de candidature à l’implantation d’un site de stockage de déchets radioactifs de faible activité à vie longue à plus de 3.000 communes dans toute la France. Théoriquement, les collectivités concernées, choisies sur des critères géologiques d’après l’Andra, avaient jusqu’au 31 octobre 2008 pour « déclarer leur intérêt pour le projet à l’Andra et faire part de leur accord pour que soient menées des investigations sur site ». L’Andra a désormais transmis les dossiers au ministère de l’Écologie qui devait rendre publique une liste de deux ou trois communes « retenues » pour aller plus loin. Mais cette décision ministérielle se fait toujours attendre aujourd’hui.
On évoque désormais la fin février, sachant que le calendrier de l’Andra prévoit un choix définitif du site en 2013 pour une mise en service en 2019.
Mais, nouvelle inquiétude pour les élus, Nicolas Lerouge, maire de Braux-Saint-Rémy en Argonne, présent à Blesme, a rapporté d’une entrevue au ministère de l’Écologie, que, même si la procédure Andra annonce que les élus ne confirmeront leur candidature que fin 2010 après une consultation publique, cette confirmation ne serait que consultative. « Ces communes ne sont plus maîtresses de leur destin et ne le savent pas », a conclu l’élu argonnais.