2010 - SUISSE : « Pas de stockage définitif avant l’abandon du nucléaire »
Source : Le Nouvelliste Ch
19 novembre 2010 - FRANCOIS NUSSBAUM
DECHETS RADIOACTIFS Pour les Verts, avant d’imaginer stocker de façon définitive les déchets radioactifs, il faut sortir du nucléaire.
Le premier feu vert à la construction de nouvelles centrales a été donné lundi, deux semaines avant la fin de la consultation sur les futurs sites d’implantation des dépôts de déchets radioactifs. Pour les Verts, les deux choses sont étroitement liées : avant d’envisager des dépôts définitifs de déchets, il faut cesser d’en produire, c’est-à-dire décider de sortir du nucléaire, ont-ils dit hier. Car, pour un entreposage sûr, on est encore loin du compte, estiment-ils.
Quelques ratés historiques
Le conseiller national vaudois Christian van Singer a rappelé l’histoire des ratés dans ce domaine. Comme les déchets radioactifs largués en haute mer par la Suisse (1971-82) dans 6700 fûts « résistant à la corrosion durant 1000 ans » qui se sont éventrés après quelques années. Ou les anciens puits de pétrole « étanches à jamais », utilisés par les Russes, qui ont déjà contaminés les nappes phréatiques. Ou encore les anciennes mines de sel en Allemagne, déjà envahies par l’eau.
Six sites sélectionnés
Il est question aujourd’hui de couches à Opalinus. La Société coopérative pour le stockage de déchets radioactifs (la Nagra) a sélectionné six sites d’implantation en profondeur dans de telles roches, situés dans la région Soleure-Argovie-Zurich. Toute la procédure est fixée dans un « plan sectoriel » qui doit aboutir, vers 2020, au choix de deux sites. L’un pour le stockage définitif des déchets à faible/moyenne radioactivité, l’autre pour ceux hautement radioactifs. Ou un seul pour les deux types.
Consultations
Mais le plan sectoriel prévoit aussi des consultations. D’abord des partis, cantons et organisations : les Verts ont ainsi présenté leurs réponses hier. Puis, dès que le Conseil fédéral aura confirmé la liste des sites en lice pour la suite, les populations concernées auront la parole. « Mais sans droit de véto, comme pour de nouvelles centrales nucléaires », note la conseillère nationale zurichoise Marlies Bänziger : il n’y aura référendum facultatif que sur le choix final, et seulement au niveau national.
Il y a des situations paradoxales, relève sa collègue soleuroise Brigit Wyss : le gouvernement de son canton soutient la construction d’une nouvelle centrale à Gösgen mais se montre très critique à propos d’un dépôt de déchets. « Comment approuver la construction d’une centrale avant qu’une solution ne soit trouvée pour les déchets ? », s’insurge-t-elle. Et cette solution semble encore éloignée.
Eurodéputée invitée
Pour Matthias Gautschi, membre du comité argovien contre un dépôt dans le Bözberg (un des six sites), les documents du dossier soumis à consultation ne sont pas compréhensibles : « Les connaissances sur les dépôts sont actuellement insuffisantes et ne permettent pas de comparer les sites ». Invitée hier, l’eurodéputée allemande Rebecca Harms s’inquiète aussi du fait que la directive européenne sur les déchets radioactifs minimise gravement ce problème.
L’alternative d’un stockage non définitif (déchets récupérables) - qui pose aussi d’importants problèmes - est d’ailleurs mal étudiée, dit-elle. A l’exemple du dépôt dans les mines de sel inondées en Hesse : sortir les fûts coûtera des milliards.