PARIS - L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) a indiqué jeudi avoir rappelé à l’ordre les producteurs de déchets nucléaires qui, EDF en tête, contestent la compétence de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) dans le projet de stockage profond dans la Meuse.

"Les rôles sont parfaitement définis par la loi. La loi dit en particulier que c’est l’Andra qui est responsable de la gestion des déchets, de la création, de la gestion et de l’exploitation des stockages, et que tout ceci se fait sous le contrôle de l’ASN", a souligné le président de l’ASN André-Claude Lacoste au cours d’une rencontre avec la presse.
M. Lacoste répondait à une question sur les récentes attaques lancées contre l’Andra par des industriels du nucléaire. Tenus par la loi de financer la construction du centre de stockage géologique profond en vertu du principe "pollueur-payeur", certains d’entre eux (EDF, Areva...) ont remis en cause la compétence technique de l’Andra et font pression pour être associés au projet.

"En ce qui nous concerne à l’ASN, nous avons clairement rappelé aux producteurs de déchets que la loi est la loi et qu’on l’appliquerait", a insisté M. Lacoste, regrettant ces "prises de parole à haute voix et de façon parfois virulente" des industriels.
Ces derniers s’inquiètent notamment de l’augmentation du coût du site de stockage profond dans la Meuse, évalué en 2002 à 15 milliards d’euros mais qui pourrait atteindre 20 à 35 milliards d’euros selon les estimations. Le patron d’EDF, Henri Proglio, avait publiquement critiqué en octobre dernier "une dérive des coûts" à provisionner par son entreprise.

Aux termes de la loi, EDF doit financer 80% du centre de stockage profond destiné aux déchets les plus dangereux, contre 15% pour le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), le reste se répartissant entre les autres producteurs de déchets nucléaires (Areva notamment).
Sur ce chapitre, André-Claude Lacoste a estimé que les "chiffres cités sont à prendre avec beaucoup de précaution". "Ce sont des chiffres qui correspondent à la création et à l’exploitation pendant cent ans d’un ouvrage qui entrera en fonctionnement en 2025. Vous imaginez la difficulté d’en définir très précisément le coût", a-t-il dit, rappelant que c’est le gouvernement qui tranchera au bout du compte.
Les industriels du nucléaire, EDF en tête, avaient déjà essuyé récemment les vives critiques de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), qui leur avait adressé un "rappel à la loi".
Plus globalement, les députés ont estimé que la crédibilité et la sécurité des projets d’enfouissement et de réduction des déchets nucléaires risquaient d’être remises en cause par les industriels du secteur "au nom de la rentabilité à court terme".

(©AFP / 10 février 2011 13h52)